”Notre sainte Mère Anthouse était fille d’un couple pieux, Stratigios et Fébronie. Depuis sa plus tendre enfance, elle désirait vivre dans la virginité et se retirer du monde pour embrasser la vie solitaire dans les déserts et les montagnes. Un hiéromoine, nommé Sisinnios, qui était orné de toutes les vertus et avait reçu de Dieu le don des miracles, étant de passage dans la région, Anthouse lui demanda de lui donner une règle pour l’initier à la vie monastique. Après lui avoir prescrit un canon de prière et de vie ascétique, Sisinnios, désireux d’éprouver son obéissance, lui ordonna de se jeter dans un four allumé. La bienheureuse y pénétra sans aucune hésitation et ressortit, quelques instants après, sans avoir rien souffert. Le saint homme lui enseigna alors tout ce qui est nécessaire pour s’approcher de Dieu, et après l’avoir tonsurée, il lui prescrivit d’aller vivre à Mantinéon, petite île située sur un lac proche du village de Périklé [Les auteurs anciens situent Mantinéon en Paphlagonie. Selon d’autres, le lac de Périklé devrait être identifié avec le lac dénommé aujourd’hui Cagagöl à l’est de Claudiopolis, dans la province d’Honorias (est de la Bithynie).
Ce monastère est mentionné dans la notice de S. Romain nouveau-martyr (cf. 1er mai) et dans la vie longue de S. Pierre d’Atroa (éd. Bruxelles, 1956, p. 79; cf. 3 janv.)], lui prédisant qu’elle y deviendrait higoumène d’un monastère de neuf cents moniales. Parvenu dans cette île la sainte y vécut dès lors dans une stricte abstinence : portant des liens de fer et revêtue de grossiers vêtements de crin, elle se livrait à de grandes austérités qui la préparèrent à devenir une digne demeure de la Sainte Trinité. Après quelque temps, elle demanda à Sisinnios sa bénédiction pour ériger une église dédiée à sainte Anne, mère de la Mère de Dieu. Une fois la construction achevée, la prophétie de Sisinnios commença à se réaliser et une trentaine de disciples se réunirent autour de la sainte. À la mort de son père spirituel, la communauté s’agrandissant, elle fit construire deux autres églises : l’une dédiée à la Mère de Dieu pour les moniales, et l’autre aux Saints-Apôtres pour les moines disciples de Sisinnios, qui, après le décès de ce dernier, avaient décidé de se mettre sous la direction spirituelle de sainte Anthouse. [Un des rares exemples d’une sainte dirigeant spirituellement un « monastère double », cf. Ste Mélanie (31 déc.), Ste Hilda (17 nov.).]
L’empereur Constantin Copronyme, ennemi du Christ et des saintes icônes, ayant entendu parler de la sainte et de sa fidélité aux dogmes orthodoxes, envoya l’un des siens au monastère de Mantinéon pour la faire adhérer à son hérésie. La bienheureuse comparut devant les envoyés de l’empereur avec son neveu, qui était higoumène du monastère des hommes. Celui-ci fut d’abord flagellé pendant de longues heures ; mais, encouragé par Anthouse, il resta inflexible. Les soldats s’emparèrent ensuite d’Anthouse, l’attachèrent par les quatre membres et la frappèrent sauvagement avec des nerfs de bœuf. Ils rassemblèrent un grand nombre d’icônes qui se trouvaient au monastère, y mirent le feu et les placèrent sur la tête et sur les membres de la sainte, dont les pieds avaient été posés sur des charbons ardents. Comme, par la grâce du Christ, elle était restée indemne, on l’envoya en exil.
Quelque temps après, l’empereur partant en campagne contre les Arabes avec son armée (756), passa dans cette région. Il fit comparaître devant lui la sainte et alors qu’il lui promettait de la livrer à de terribles tortures, il fut soudain frappé de cécité et dut renoncer à prendre contre elle d’autres mesures de coercition. Par la suite, alors que l’impératrice en couches se trouvait en danger de mort, sainte Anthouse lui prédit qu’elle donnerait naissance à des jumeaux, un garçon et une fille, et lui donna même des détails sur ce que serait la vie de chacun. L’impératrice reconnaissante devint alors protectrice du monastère, auquel elle consacra villages et donations diverses, et le souverain cessa toute persécution à son égard.
Anthouse acquit dès lors une grande renommée, de partout on accourait à elle : qui, pour recevoir sa bénédiction ; qui, pour devenir moine sous sa direction ; qui, pour recevoir par ses prières la guérison de ses maux. Après avoir accompli des miracles aussi nombreux que le sable de la mer, elle s’endormit en paix et fut inhumée dans la cellule où elle avait passé sa vie.