”Dès son entrée au Monastère des Grottes de Kiev, saint Polycarpe entreprit de vaillants combats, sous la direction de son parent, saint Simon (cf. 10 mai), et il ne tarda pas à porter des fruits spirituels abondants, comme son nom le suggère. Quand Simon fut nommé évêque de Vladimir, il emmena Polycarpe avec lui, et continua de l’instruire dans la science spirituelle, tant par ses paroles que par ses actes. Il lui rapportait les hauts faits des saints Pères qui les avaient précédés, leurs combats et comment ils avaient plu à Dieu. Désireux de faire profiter de cet héritage tous ceux qui sont avides de faire leur salut, Polycarpe mit par écrit les récits rapportés par Simon, puis les envoya à l’higoumène du Monastère des Grottes, Akindynos. [Il continua donc l’œuvre entreprise par S. Nestor le Chroniqueur (cf. 27 oct.), qui allait constituer le Paterikon de Kiev.]
Par la suite, il revint au monastère, et s’efforça de vivre, malgré la séparation, comme s’il était toujours en présence de son père spirituel. Après le repos d’Akindynos, la communauté l’élut unanimement pour assurer la direction de la Laure. Placé par la Providence à la tête de ce grand et prestigieux monastère, saint Polycarpe dépensa ses forces pour préserver en tout point la tradition léguée par saint Théodose. Il était pour les frères un guide habile et diligent à les conduire dans la voie du salut. La renommée de la Laure s’étendit partout, et nombreux étaient ceux qui — hommes de toutes conditions aussi bien que dignitaires de la cour — venaient demander ses conseils pour mener une vie vertueuse. Certains de ces hauts personnages décidaient même de tout abandonner afin de vivre au monastère sous sa direction. Le grand-prince Rotislav Mstislavovitch, après avoir reçu les conseils de saint Polycarpe, communiait chaque semaine, la face baignée de larmes pour ses péchés. Il demanda même à plusieurs reprises au saint de l’accepter comme moine, mais Polycarpe lui répondait : « Dieu te commande, pieux Prince, de rester dans ta condition, pour gouverner selon la justice et te tenir inébranlablement devant la Croix. » — « Mais, Père saint, on ne peut être prince dans ce monde sans tomber dans le péché.
Je suis épuisé et affaibli par les soucis quotidiens. Et je désire, au moins dans ma vieillesse, servir Dieu et imiter ces princes qui ont emprunté la voie étroite et sont entrés dans le Royaume des Cieux. J’ai même entendu dire que saint Constantin le Grand était apparu à un Ancien pour lui révéler qu’ayant vu la gloire dont jouissent les moines dans le ciel, il regrettait de ne pas avoir déposé sa pourpre pour revêtir la bure monastique. » Malgré ces généreuses dispositions, le prince ne devint pas moine. Étant tombé gravement malade et se trouvant aux portes de la mort, il pria le Seigneur de ne pas lui imputer comme péché de ne pas être entré au monastère, et, grâce aux instructions avisées que lui avait prodiguées saint Polycarpe, il eut une sainte mort.
Après le repos de saint Polycarpe, advenu le 24 juillet 1182, la Laure resta longtemps sans higoumène, non qu’elle fût dépourvue de saints hommes capables de guider les autres, mais parce que ces bienheureux pères étaient si humbles qu’ils n’osaient accepter une telle charge. Cette situation provoqua bientôt le trouble dans la communauté qui ne pouvait vivre sans pasteur. Un jour, les frères se réunirent dans l’église et prièrent pour que, s’il avait trouvé accès auprès de Dieu, saint Polycarpe leur révélât le nom de son successeur. Une voix se fit alors entendre : « Allez trouver le pieux prêtre veuf Basile, à Shchekovitsa, faites-le moine, et qu’il devienne votre higoumène! » Les frères s’exécutèrent aussitôt, mais ce ne fut qu’après de longues instances que le prêtre Basile accepta leur offre et les suivit au monastère. Les évêques Nicéphore de Kiev, Laurent de Turov et Nicolas de Polotsk, ainsi que de nombreux abbés des monastères voisins, assistèrent à sa tonsure monastique, suivie de son intronisation. Il fut, à l’exemple de saint Polycarpe, un modèle de vertu et dirigea le monastère en toute sagesse jusqu’à son bienheureux repos.