”Sur ces entrefaites, trois mages, venus du lointain Orient, arrivèrent à Jérusalem avec leur brillant équipage et demandèrent à voir le roi qui venait de naître pour le vénérer. [Selon certains, ils venaient de Perse, selon d’autres ils devaient plus probablement venir d’Arabie, contrée de langue sémitique, qui était alors le centre du commerce des denrées rares qu’ils amenèrent en présents. Par ailleurs, certains interprètes considèrent qu’il arrivèrent le jour même de la Nativité, ayant été prévenus longtemps auparavant par l’astre; d’autres affirment que l’astre leur apparut en ce jour et qu’ils n’arrivèrent à Bethléem pour adorer l’Enfant que bien plus tard (13 jours, ou 2 ans); un troisième groupe soutient qu’ils virent l’étoile apparaître le 24 décembre et arrivèrent à Jérusalem le lendemain, transportés par un ange, comme le prophète Habacuc fut autrefois transféré de Jérusalem à Babylone pour rendre visite au prophète Daniel (cf. 2 décembre).] Prêtres et devins chez les païens adorateurs du soleil et des autres astres, ils n’en étaient pas moins pourvus de droiture et de sagesse, scrutaient les corps célestes, non pour y prévoir l’avenir mais pour y distinguer les voies de la Providence divine, étudiaient les secrets de la nature pour arriver à la connaissance de la Vérité. Pleins de ces bonnes dispositions, ils avaient vu un jour un astre apparaître soudain dans le firmament, s’approcher de la terre et briller d’un vif éclat, au point de paraître même en plein jour, en éclipsant tous les autres.
Instruits des oracles des anciens prophètes, les Mages se souvinrent alors de la prophétie prononcée jadis à propos d’Israël par le devin Balaam, venu de Mésopotamie à la requête du roi de Moab, Balaq: «Je le vois, mais non pas maintenant, disait-il; je le glorifie, mais non de près: un astre se lève de Jacob et un homme (un sceptre royal. Hebr.) se lève issu d’Israël» (Nombres 24, 17). Ce roi qui allait soumettre les nations, le Messie attendu par Israël, était donc arrivé, conclurent- ils. Et, «prémices des païens» annonçant la future conversion des peuples éloignés de la révélation d’Israël, ils se mirent en route pour aller l’adorer avant les Juifs au cœur endurci, précédés par l’étoile qui leur indiquait le chemin.
Étrange et paradoxale, cette étoile n’était pas un astre naturel, mais une puissance divine, un ange, qui avait prit la forme d’un astre pour s’adapter aux facultés des compréhension des Mages, à ce qui était pour eux le plus familier et les rapprochaient de la connaissance de Dieu. Plus brillant que le soleil, parfois en mouvement et parfois immobile; contrairement aux planètes qui ont leur mouvement apparent d’Est en Ouest, cet astre avançait du Nord (Perse) au Sud (Jérusalem), apparaissant tantôt devant eux pour leur montrer le chemin, tantôt disparaissant de leur vue, comme lorsqu’ils parvinrent à Jérusalem. Il se tenait ainsi devant les Mages, comme autrefois la colonne de feu devant le peuple d’Israël dans le désert (Ex. 13, 21), et descendait si proche de la terre qu’il put leur désigner de son éclat la grotte où reposait le Seigneur. Choses extraordinaires et inconnues des astrologues, grâce auxquelles, chassant de leur esprit le doute et repoussant toute enquête soupçonneuse, les Mages se détournèrent du culte des astres et se mirent en route pour adorer le Soleil de justice, venu en ce monde pour répandre parmi les hommes la lumière de la vraie connaissance de Dieu [Malachie 4, 2. Voir l’apolytikion de la fête].
Quand ils arrivèrent à Jérusalem, l’astre disparut de leur vue; ne sachant pas où aller et croyant que les Juifs étaient disposés à reconnaître leur Roi venu d’En-haut, ils se rendirent au palais d’Hérode, le roi de Judée, homme cruel et débauché, qui n’éprouvait aucun scrupule à faire disparaître quiconque feignait de s’opposer à son pouvoir. Aussi, en apprenant des Mages la raison de leur visite, rassembla-t-il aussitôt les scribes et les docteurs de la Loi pour apprendre ce qu’il en était de ce roi annoncé par les prophètes. Les sages lui confirmèrent qu’effectivement le Messie, le Libérateur d’Israël, était bien attendu à Bethléem, la patrie du roi David. Il manda secrètement les Mages et les envoya à Bethléem, en leur recommandant de l’informer à leur retour de l’endroit où reposait ce «roi» nouveau-né, «afin que j’aille moi aussi lui rendre hommage» dit-il; mais en fait avec l’intention de le faire périr.
Sitôt sortis de Jérusalem, l’étoile réapparut aux Mages et les conduisit jusqu’à la grotte. Pleins de joie et de crainte sacrée, ces nobles et riches étrangers entrèrent dans l’humble étable comme dans le palais du plus grand des rois, ils se prosternèrent devant l’Enfant qui reposait dans la mangeoire comme sur un trône, et, ouvrant les trésors de leurs cœurs, ils l’adorèrent et lui offrirent des présents rares et précieux: de l’or, pour l’honorer comme roi, de l’encens comme il convient à un Dieu, et de la myrrhe —parfum utilisé pour embaumer les défunts— comme à l’Immortel qui allait bientôt souffrir la mort pour notre Salut [Selon d’autres l’or, l’encens et la myrrhe symbolisaient l’adoration respectives des anges, des hommes et des âmes détenues dans l’Hadès; ou encore la foi, l’espérance et la charité que tout fidèle doit offrir en présent au Christ]. Puis, ayant été instruits en songe du perfide dessein d’Hérode, ils s’en retournèrent par un autre chemin, enseignant ainsi à ceux qui se sont approchés du Christ à ne pas reprendre les voies de l’impiété.