“Saint Luc était originaire de la ville d’Antioche, probablement d’une famille païenne, et il s’était appliqué depuis sa jeunesse à progresser dans la sagesse et l’étude des sciences et des arts. Il voyagea de par le monde afin d’étancher sa soif de connaissances et il excellait en particulier dans la science médicale et dans l’art de la peinture. Outre la langue grecque, qu’il maniait admirablement comme en témoigne son Évangile, il connaissait aussi l’hébreu et le syriaque (araméen). Une tradition ecclésiastique rapporte qu’il était du nombre des Soixante-Dix Disciples envoyés par le Seigneur Jésus-Christ, deux par deux, pour annoncer devant Lui le Salut dans villes et villages. [Le fait que Luc est le seul Évangéliste à mentionner l’envoi des Soixante-Dix disciples semblerait confirmer qu’il se trouvait parmi eux.] Lors de la Passion vivifiante, il se trouvait à Jérusalem et, au matin de Pâques, il cheminait avec Cléopas (cf. 30 oct.) vers le village d’Emmaüs, triste et désemparé par la perte du Maître. Mais cette tristesse se mua en une ineffable joie quand le Christ, qui leur était apparu sans qu’ils puissent le reconnaître, leur révéla, à la fraction du pain, qu’Il était bel et bien ressuscité (cf. Lc. 24, 35). Après la descente du Saint-Esprit, le jour de la Pentecôte, Luc resta quelque temps à Jérusalem avec les autres Apôtres, puis il retourna à Antioche, où se trouvaient déjà quelques disciples.

Certains rapportent que, s’arrêtant à Sébaste (Samarie) pour y prêcher la Bonne Nouvelle, l’Apôtre obtint la relique de la main droite du saint Précurseur, qu’il transféra comme un précieux trophée dans sa patrie. Ce serait donc à Antioche qu’il aurait rencontré saint Paul, au cours du second voyage missionnaire de ce dernier (vers 50) et de là il l’aurait accompagné en Grèce pour y proclamer le Salut. Cependant une autre tradition [Dont témoigne le Synaxaire de Constantinople, alors que la précédente a été consignée par S. Syméon Métaphraste d’après des auteurs anciens (Origène, Clément d’Alexandrie, Eusèbe de Césarée)] rapporte que Luc n’a pas connu le Seigneur durant son séjour terrestre, et qu’il rencontra saint Paul à Thèbes, en Béotie, sous le règne de Claude (vers 42), alors qu’il était en train de dispenser ses soins aux malades. Les paroles de feu de l’Apôtre le convainquirent de la Vérité, qu’il avait cherchée vainement dans la sagesse humaine depuis tant d’années; et, abandonnant tous ses biens sans hésitation, il renonça à la médecine des corps, pour devenir à la suite de Paul, médecin des âmes. Accompagnant donc l’Apôtre dans ses missions, de Troas à Philippes, Luc fut laissé par Paul dans cette ville, en vue d’y consolider la communauté ecclésiastique naissante. Il resta plusieurs années en Macédoine, et quand Paul visita de nouveau Philippes, lors de son troisième voyage (58), il envoya Luc à Corinthe pour y recevoir la collecte rassemblée par les fidèles au profit des pauvres de Jérusalem. Ils se rendirent ensemble dans la Ville sainte, confirmant en chemin les Églises. Quand Paul fut arrêté et transféré à Césarée de Palestine, Luc ne l’abandonna pas, et il le suivit même jusqu’à Rome pour comparaître devant le tribunal de César, endurant toutes les difficultés d’un voyage dont il rapporta les péripéties à la fin des Actes des Apôtres (27-28). C’est à Rome que Luc rédigea, sous la direction de Paul, son Évangile et les Actes des Apôtres, dédiés à Théophile, gouverneur d’Achaïe, qui s’était converti au christianisme. [Selon d’autres, il les aurait rédigés à Jérusalem.

Le prologue de l’Évangile de Luc semble confirmer qu’il n’avait pas été lui-même témoin oculaire de la vie du Seigneur, puisqu’il écrit : «…d’après ce que nous ont transmis ceux qui furent depuis le début témoins oculaires et serviteurs de la Parole, j’ai décidé, moi aussi, après m’ être informé exactement de tout depuis les origines, d’en écrire l’ exposé suivi… » (Lc 1, 2).] Ajoutant des détails qu’on ne trouve pas dans les deux premiers évangiles, il raconte la vie du Sauveur, en soulignant particulièrement sa miséricorde et sa compassion envers l’humanité pécheresse, qu’Il est venu visiter comme un Médecin. Et dans les Actes, après avoir rapporté les événements qui marquèrent la fondation de l’Église à Jérusalem, il souligne particulièrement les œuvres apostoliques de son maître, saint Paul, celui qui, plus que tous les autres Apôtres, avait travaillé à la diffusion de la Parole évangélique. Après deux années d’emprisonnement à Rome, Paul fut relâché, et il reprit aussitôt ses courses apostoliques, suivi de son fidèle disciple Luc. Mais peu après, Néron déclencha sa furieuse persécution contre les chrétiens de Rome. Paul, au risque de sa vie, vint pour la seconde fois dans la capitale, afin d’y confirmer les fidèles. C’est là qu’il fut arrêté et jeté aux fers, dans des conditions bien plus pénibles que la première fois. Luc, resta inébranlablement fidèle à son maître alors que d’autres l’avaient abandonné (II Tim. 4, 11), et il est probable qu’il assista à son martyre, mais il n’en a pas laissé le témoignage écrit. Après la mort glorieuse de l’Apôtre des Nations, Luc prit le chemin du retour, en prêchant la Bonne Nouvelle en Italie, en Dalmatie et en Macédoine, puis de là il passa en Achaïe. On raconte que, dans sa vieillesse, il se rendit aussi en Égypte, pour y évangéliser les païens au prix de nombreuses tribulations. Il serait même parvenu dans la lointaine Thébaïde, et aurait ordonné saint Abile second évêque d’Alexandrie. [Cette tradition n’est mentionnée que par S. Syméon Métaphraste.] De retour en Grèce, Luc devint évêque de Thèbes en Béotie, il ordonna prêtres et diacres, fonda des églises et guérit par sa prière les malades de l’âme et du corps. C’est là, qu’à l’âge de quatre-vingtquatre ans, il fut arrêté par les idolâtres et, qu’après avoir été écorché vif, il mourut en étant suspendu en croix à un olivier. [Sa mort en martyr est rapportée par les auteurs les plus anciens (Grégoire le Théologien notamment), mais seul Nicéphore Calliste (XIVe s.) mentionne le supplice de la mise en croix.

Selon d’autres (Élie de Crète, Nicéphore Grégoras), le saint apôtre serait mort en paix.] De nombreux miracles s’accomplirent par la suite, grâce à un liquide miraculeux qui suintait de son tombeau, et guérissait en particulier les maladies des yeux de ceux qui s’en oignaient avec foi. De longues années après, le 3 mars 357, l’empereur Constance, fils de saint Constantin le Grand, envoya saint Artémios, duc d’Égypte (cf. 20 oct.), à Thèbes, pour procéder au transfert des reliques du saint Apôtre Luc dans l’église des Saints-Apôtres à Constantinople, et les déposer sous l’autel, avec celles des Apôtres André et Timothée. La tradition de l’Église rapporte en outre que saint Luc fut le premier à peindre des icônes, et qu’il exécuta une image de la sainte Mère de Dieu, du vivant de celle-ci. La Toute-Sainte accueillit avec joie cette représentation et dit : « Que la grâce de Celui qui a été enfanté par moi soit en elle! » [Cette icône de la Mère de Dieu portant le Christ-Enfant (I’Hodigitria) fut envoyée, de Palestine à Constantinople, par l’impératrice Eudocie en cadeau à sa sœur Pulchérie, qui la fit déposer dans le monastère des Hodègues, fondée par elle. Elle y accomplit d’innombrables miracles, en particulier lorsqu’elle fut promenée sur les remparts pour repousser les Arabes qui assiégeaient la Ville (717). Elle fut détruite par les Turcs lors de la prise de Constantinople. D’autres icônes peintes par S. Luc se trouvent, l’une au monastère de la Grande-Grotte dans le Péloponnèse (cf. plus bas, notice de SS. Syméon et Théodore), l’autre au monastère du Kikkou en Chypre, et une autre, au monastère de Soumela dans le Pont (cf. 18 août). Ici ou là, on rencontre d’autres icônes attribuées traditionnellement à l’Apôtre.] Par la suite, Luc peignit d’autres images de la Toute-Sainte et des Apôtres, et transmit à l’Église la pieuse et sainte tradition de la vénération des icônes du Christ et de Ses saints, c’est pourquoi il est honoré comme le patron des iconographes.