⇐ Table des matières
- «Jésus Christ, hier et aujourd’hui, est le même, et pour les siècles des siècles»
- Respecter la tradition
- Le monde reviendra à la tradition
- Le monde ne peut se maintenir sans la foi
- Nous devons laisser aux générations ultérieures un bon héritage
«Jésus Christ, hier et aujourd’hui, est le même, et pour les siècles des siècles»
– Géronda, on parle souvent de «renouveau dans l’Église», comme si l’Église vieillissait et avait besoin de renouveau!
– Oui, elle a vieilli! Dire que même des hommes sans piété particulière, ayant seulement un peu de cervelle, ne se plaisent pas dans les nouveautés qu’on introduit aujourd’hui dans l’Église, mais apprécient l’ancien. Les icônes modernes, par exemple, les laissent froids, alors qu’ils comprennent la valeur d’une icône ancienne. Si des personnes ayant un peu de cervelle jugent ainsi, combien a fortiori, celles qui sont pieuses! Tu peux donc en déduire combien toutes ces discussions à propos de «renouveau» dans l’Église sont superflues et sans fondement.
De nos jours, si quelqu’un s’efforce de garder la Tradition orthodoxe, d’observer les jeûnes, de ne pas travailler les jours de fête, d’être pieux, certains s’exclament: «D’où sort-il celui-là? De sa province? Ces pratiques appartiennent au passé, elles sont désormais révolues!». Et si tu oses avancer quelque objection, ils te répliquent: «A quelle époque vis- tu? Ces pratiques sont dépassées!». Petit à petit, on considère la Tradition de l’Église comme un mythe d’antan. Que dit pourtant l’Écriture? «Jésus Christ, hier et aujourd’hui, est
le même, et pour les siècles des siècles»1 . Que celui qui ne peut observer les préceptes de l’Église Orthodoxe confesse au moins: «Seigneur, j’ai péché!», et Dieu lui fera miséricorde. Mais non, au lieu d’avouer sa faiblesse, il s’efforce d’entraîner avec lui autrui, car sa conscience lui fait des reproches. Si tu places un démoniaque dans une atmosphère spirituelle, tu le verras se tourner et retourner de tout côté sans pouvoir rester en place, car il se sentira sous pression. On observe ici un phénomène analogue: les hommes qui veulent justifier leurs passions ne peuvent supporter la vie vertueuse des autres, parce qu’elle les accuse. Et c’est afin d’étouffer leur conscience qu’ils avancent diverses excuses. Ils prétendent que les valeurs anciennes sont dépassées et s’efforcent de remplacer l’ordre moral par le désordre et l’immoralité. De nos jours domine dans le monde une extrême perversion des valeurs! La beauté spirituelle passe pour laideur, pour une horreur. Prends, par exemple, un moine auquel on coupe la barbe et les cheveux, comme il est enlaidi! Néanmoins, c’est cette laideur que les hommes mondains considèrent comme de la beauté.
Voyez comme le monde actuel combat l’Église et s’efforce de la détruire. Admettons qu’il ne croie pas en Dieu et prêche l’athéisme. Mais pourquoi refuse-t-il de reconnaître le bien accompli par l’Église et s’acharne-t-il contre elle? Cela manifeste une grande perversion. Pourquoi n’admet-il pas que l’Église protège les enfants, les aide à ne pas devenir des vagabonds et leur enseigne à devenir des hommes droits? Les dirigeants font exactement l’inverse. Ils poussent les jeunes hors du droit chemin, permettent qu’on les détruise autant qu’on veut. Que leur enseigne, en revanche, l’Église? A être responsables, à respecter autrui, à garder la chasteté, afin de devenir d’honnêtes citoyens. Mais malgré cette tentative qui vise à détruire l’Église, tout finira par
1. Hb 13, 8.
rentrer dans l’ordre. Dans une église de Russie, une vieille dame priait agenouillée au pied d’une colonne. Une jeune femme, une scientifique éminente, s’approcha d’elle pour l’apostropher ainsi: «Ces pratiques sont démodées!». La vieille lui répliqua: «Au pied de cette colonne, où tu me vois pleurer aujourd’hui, tu viendras, toi aussi, pleurer un jour! Vos idées iront et passeront, iront et passeront, tandis que le christianisme ne passera jamais!».
Respecter la tradition
De nombreux saints martyrs, n’ayant pas une connaissance précise des dogmes du christianisme, témoignaient de leur foi par ces simples mots: «Je crois ce qu’ont établi les Saints Pères!». Affirmer cela suffisait au chrétien pour subir le martyre. Le saint ne savait pas défendre sa foi par des arguments théologiques pour tenter de convaincre ses persécuteurs, mais il se fiait à l’enseignement des Pères. «Comment pourrais-je ne pas faire confiance aux Saints Pères? – se disait-il. Eux étaient bien plus expérimentés et vertueux que moi, eux étaient saints. Comment pourrais- je accepter une telle absurdité et tolérer qu’on insulte les Pères?». Nous devons nous fier à la Tradition. Aujourd’hui, malheureusement, la politesse européenne est de mise, et les hommes s’efforcent de paraître aimables. Ils désirent manifester leur ouverture d’esprit et finissent par se prosterner devant le diable à deux cornes! Prônant l’existence d’une religion universelle, ils mettent tout au même niveau. Des partisans de cette théorie vinrent me dire: «Ceux qui croient au Christ doivent constituer une religion unique! – C’est comme si vous me disiez que l’or et le bronze sont un même métal, leur répliquais-je, et que vous me proposiez de refondre de l’or pur de dix huit carats, obtenu après séparation d’un mélange or-bronze, avec le bronze que l’on en a extrait. Cela a-t-il un sens? Posez la question a un orfèvre.
“Est-il juste de fondre ensemble de l’or pur et un vulgaire métal?”. Les Saints Pères ont tant lutté pour purifier le dogme des hérésies!». Ils savaient ce qu’ils faisaient en interdisant qu’on prie avec les hérétiques. Mais aujourd’hui on nous invite à prier non seulement avec les hérétiques, mais aussi avec les bouddhistes, les idolâtres, et même avec les satanistes! On affirme: «Les Orthodoxes doivent participer à leurs célébrations et congrès, car ils y manifestent la présence orthodoxe!». Quelle présence? On cherche à tout résoudre par la raison et à justifier l’injustifiable. L’esprit européen pense que les questions spirituelles peuvent être objet de débats au Marché Commun.
Certains Orthodoxes qui ne réfléchissent pas beaucoup. mais veulent aller de l’avant et se faire missionnaires, organisent des congrès avec des hétérodoxes – congrès dont on fait grande publicité – et pensent qu’en mangeant ainsi à la même marmite que les hérétiques, ils contribueront à promouvoir l’Orthodoxie. Les super-zélotes prennent alors le relais et tirent à l’autre extrême. Ils blasphèment, rejettent les sacrements des Églises ayant adopté le nouveau calendrier, et ils scandalisent les âmes pieuses ainsi que les fidèles ayant une profonde sensibilité orthodoxe. Quant aux hétérodoxes, ils participent volontiers à ces congrès, où ils jouent au professeur, prennent de l’Orthodoxie la part de spiritualité qui leur semble bon pour la faire passer par leur moulinette, la teindre avec leur couleur et lui mettre leur propre étiquette, pour la présenter ensuite comme originale. Nos contemporains dotés d’un bizarre tour d’esprit s’enthousiasment de ces bizarreries théologiques et ils arrivent ainsi à la catastrophe spirituelle. Mais au moment opportun, le Seigneur fera surgir des Marc d’Ephèse et des Grégoire Palamas, lesquels rassembleront nos frères et sœurs scandalisés par ces compromis avec l’hérésie, confesseront la foi orthodoxe, affermiront la Tradition des Pères, et procureront une immense joie à notre Mère l’Eglise.
Si nous vivions selon l’esprit des Pères, nous serions tous en bonne santé spirituelle, une santé que tous les hétérodoxes nous envieraient; sans même qu’il soit besoin de prédication, ils abandonneraient leurs maladives erreurs et seraient sauvés. Ils ne sont pas touchés, à présent, par notre sainte Tradition patristique, car ils voudraient vérifier en nous la continuité de cette Tradition, ils voudraient voir quelle est notre véritable parenté avec nos saints. Chaque chrétien orthodoxe est tenu de mettre les hétérodoxes en une inquiétude salutaire, afin qu’ils comprennent qu’ils sont dans l’erreur et n’apaisent pas à tort leur esprit: ils seraient privés des riches bénédictions de l’Orthodoxie en cette vie et des bénédictions plus grandes et éternelles que Dieu accorde dans l’autre Vie. Des jeunes gens catholiques viennent à mon ermitage, remplis de bonnes intentions et avides de connaître l’Orthodoxie. «Nous voudrions que tu nous donnes une parole qui puisse nous aider au plan spirituel, me disent-ils. – Eh bien, leur conseillais-je, prenez l’histoire de l’Église; vous constaterez que nous étions jadis unis: voyez où vous avez abouti. Scruter l’histoire de l’Église vous sera d’un grand profit. Agissez ainsi, et nous parlerons de beaucoup de choses la prochaine fois».
On respectait jadis un objet ayant appartenu à son grand-père et on le gardait comme une relique. J’avais tait la connaissance d’un avocat réputé, un homme spirituel, dont la maison était d’une grande simplicité. Cette simplicité le reposait, et non seulement lui, mais aussi ses visiteurs. Il me confia un jour: «Il y a quelques années, mon Père, mes amis se moquaient de moi en raison des nombreux meubles anciens qui se trouvaient chez moi. Mais aujourd’hui. ils viennent admirer mon mobilier, le considérant comme digne d’un antiquaire! Moi, je me réjouis et suis ému d’utiliser ces meubles anciens, car ils me rappellent mon père, ma mère, mes grands-parents. Mes amis, eux, ont une tout autre motivation: s’ils font collection d’antiquités
et transforment leur salle de séjour en salon d’antiquaire, c’est pour s’oublier et oublier quelque peu l’angoisse mondaine qui les étreint». Jadis, on gardait précieusement, comme si c’était une fortune, un florin d’or hérité de sa mère ou de son grand-père. Mais aujourd’hui, celui qui a hérité, par exemple, d’une livre à l’effigie du roi Georges valant cent drachmes de moins qu’une livre à l’effigie de la reine Victoria ira la changer, sans considérer si elle lui vient de sa mère ou de son père. L’esprit européen de spéculation entre peu à peu partout, et il nous emporte.
Je me souviens, lors de mon premier séjour à la Sainte Montagne, d’avoir fait la connaissance d’un pieux vieillard, qui était le Géronda d’une fraternité. Ce Géronda se distinguait par la profonde vénération dont il entourait le souvenir des moines l’ayant précédé. Par respect donc pour ses prédécesseurs, il conservait non seulement leurs kamylavchia*, mais aussi les patrons qui avaient servi à les confectionner! Il possédait également quelques livres anciens et divers manuscrits soigneusement enveloppés, qu’il gardait dans une bibliothèque bien fermée afin qu’ils ne prennent pas la poussière. Il n’utilisait jamais ces ouvrages, mais les gardait précieusement dans cette bibliothèque. «Moi, je ne suis pas digne de telles lectures, disait-il, je lis des choses plus simples, le Patéricon, l’Échelle sainte». Un jeune moine, qui était entré ultérieurement dans celte fraternité (il ne resta finalement pas au Mont Athos), dit un jour à l’Ancien’: «Qu’est-ce que tu amasses ici? Des saletés?». Se saisissant des patrons, il les jeta dans le dessein de les brûler. Le vieillard protestait en pleurant: «Qu’est-ce que cela peut te faire? Cela vient de mon grand-père spirituel. Nous avons tant de pièces vides. Laisse-les dans un coin!». Son respect pour la tradition lui faisait conserver non seulement les livres, les objets précieux, les kamylavchia*, mais encore les vieux patrons! Où existe le respect pour les petites choses, existe également un grand respect pour les grandes choses. Où
n’existe aucun respect pour les petites choses, n’existe aucun respect même pour les grandes choses. Voilà comment les Pères gardaient la tradition.
Les monastères doivent garder ce qui a été éprouvé par le temps
– Géronda, lorsqu’une nouvelle sœur est chargée d’une obédience dans laquelle est déjà fixé un certain ordre des choses, est-il juste qu’elle fasse aussitôt des changements?
– Non, elle ne doit rien changer dès le début, même si elle est seule responsable de cette obédience. De jeunes fraternités monastiques qui prirent la charge de vieux monastères ont fait exactement l’inverse: elles n’ont pas respecté l’expérience de leurs prédécesseurs. Ceux qui agissent ainsi, qui instaurent leurs programmes propres et suppriment les règles établies par les anciens moines – c’est-à-dire l’ordre des choses qui existait dans le passé, ces usages qui étaient d’une grande aide pour la vie monastique -, non seulement n’ont aucun sens de la tradition, mais même aucun respect pour la tradition. Plus tard, ils comprendront combien les choses qu’ils ont supprimées étaient nécessaires. Ceux qui les avaient introduites savaient de quoi il retournait. Ce qui existe dans le monachisme depuis les temps anciens a le poids de l’expérience. Vois, dans n’importe quel art ou métier même, on doit respecter les règles qui le régissent. En tant qu’ancien charpentier, je sais que la hauteur normale d’une table est quatre-vingts centimètres, que la largeur d’une marche est de vingt sept centimètres. Ces mesures ont été validées par l’expérience, elles sont fixées d’avance, et l’apprenti menuisier doit les accepter telles quelles sans qu’il soit nécessaire de lui en expliquer le pourquoi. Elles ont fait leurs preuves. L’apprenti doit faire confiance au maître- artisan et respecter son savoir. Celui qui n’observe pas les
règles de la menuiserie ne fera rien de bon: il fabriquera une table ou trop haute ou trop basse…
J’ai changé plusieurs fois de kalyva*… Je suis un véritable kavsokalyvite2 ! Chaque fois que j’ai fait des changements. qu’il s’agisse de portes ou clous aux murs, j’ai compris par la suite que tout avait été précédemment conçu autrement pour de bonnes raisons. Je ne fais donc désormais aucun changement lorsque je m’installe dans une nouvelle cellule, même si certaines choses ne m’arrangent pas. Je n’enlève pas un seul clou! Le Père qui occupait cette cellule avant moi avait planté ces clous en connaissance de cause. Si moi. qui n’ait aucune expérience de cette cellule, je me mets à les ôter, il me faudra à coup sûr les replanter ensuite à leur place primitive, et j’abîmerai le crépis du mur. Si un clou a été placé à tel endroit, c’est qu’il y était nécessaire; il servait sans doute à suspendre un tricot de corps ou un rasson. J’ai vécu un certain temps au Kellion* Hypatios au désert de Katounakia. Dans les moindres recoins de cette cellule, je trouvais des gros bâtons à l’extrémité recourbée. Au début, je les distribuais aux visiteurs. Mais je compris ensuite à quoi servaient ces bâtons. Le moine qui avait vécu dans cette cellule avant moi les utilisait pour attraper les serpents qui pullulaient aux alentours, et il en avait disposé un peu partout afin de ne pas courir à la recherche d’un bâton en cas de nécessité!
Le plus important dans le monachisme est de garder ce qui a fait l’épreuve du temps. Autrement, la tradition se perd et s’installe alors la transgression. Que signifie tradition. que signifie transgression? Une grande différence existe entre les deux! Allons-nous faire de la transgression une
2. Du grec kavsokalyvitis (Καυσοκαλυβίτης) qui signifie littéralement «incendiaire de kalyva». Ayant changé plusieurs fois d’ermitage, le Géronda s’assimile avec humour à saint Maxime le Kavsokalyvite (1363). ascète qui. menant une vie errante et simulant la folie, construisait de lieu en lieu une cabane primitive en branchages, qu’il brûlait sitôt construite, d’où son nom de kavsokalyvite· («incendiaire de cabane»).
3.
tradition? Aujourd’hui, certains monastères font ce qui les arrange et considèrent cela comme si c’était selon la tradition. Or, en fait de tradition, ces choses introduisent… une transgression. Comment acquérir le discernement spirituel si nous n’avons aucune sensibilité spirituelle? Dans le monachisme, voyez-vous, nous avons besoin d’une ligne de conduite tout autre: non pas une ligne de conduite à la façon de l’armée, ni une ligne de conduite à la façon des associations religieuses, pas davantage une ligne de conduite à la façon des coopératives, mais une ligne de conduite monastique, éprouvée par l’expérience et ayant un caractère patristique. On appelle souvent patristique une ligne de conduite faussement monastique – c’est-à-dire monastique en théorie, mais non en pratique -, laquelle n’a, en fait, aucun lien avec le monachisme ni avec les Saints Pères et porte simplement cet épithète parce que ceux qui la suivent ont lu force ouvrages patristiques.
Certains nouveaux monastères fonctionnent aujourd’hui comme des instituts de bienfaisance. Ils ont, certes, quelque excuse, car ils n’ont pas trouvé de levain spirituel lors de leur fondation. Ils auraient pu néanmoins prendre conseil de monastères plus anciens. Après le joug turc, lorsque les premiers monastères commencèrent à s’organiser, il n’y avait aucun levain spirituel. Les Bavarois3 , d’une part, s’efforçaient de fermer les monastères existant pour s’emparer de leurs richesses. Ils allèrent même jusqu’à formuler des décrets ordonnant aux moines de se marier afin de pouvoir dissoudre leurs monastères! Les Grecs, d’autre part, négligèrent
3. En 1833, le prince Othon de Bavière, mineur, fut élu roi de la Grèce libérée. Arrivèrent en Grèce en plus du roi Otto et de son conseil de régence de nombreux Allemands, qui occupèrent la majorité des postes importants dans le gouvernement, l’armée et l’économie. Commença alors la période dite de l’oppression bavaroise, laquelle lut, dans bien des domaines, plus pénible pour les Grecs que le joug turc. E e prit fin le 3 septembre 1843 avec l’abolition de la monarchie, l’adoption de la constitution et l’éviction des Bavarois.
de scruter l’histoire pour apprendre ce qu’était jadis le monachisme et revenir à la Tradition. Voyant que les monastères possédaient des vaches, des veaux, etc., ils se disaient: «Voilà en quoi consiste le monachisme, à élever du bétail!». Or la raison pour laquelle les monastères avaient des vaches, des veaux et des porcs était que, sous l’occupation ottomane, tous ceux qui avaient des richesses ou du bétail les donnaient, les malheureux, aux monastères pour empêcher les Turcs de s’en emparer. Les malades, les infirmes venaient dans les monastères pour manger du pain. On les nourrissait et on nourrissait les pauvres. Tous les malheureux trouvaient refuge dans les monastères. Il n’existait pas d’instituts de charité, et c’est pourquoi les moines étaient obligés d’élever du bétail afin de pouvoir aider le peuple. Et par la suite, alors que ce besoin n’existait plus, ils continuèrent d’avoir des veaux, des vaches, des moutons et de l’élevage si bien que maints spirituels de cette époque firent observer avec regret: «Voyez l’état lamentable de notre monachisme!». Ils se tournèrent alors vers l’Occident pour prendre comme modèle le monachisme occidental avec son orientation missionnaire et ils se mirent à son école. Ils ne s’intéressèrent pas à notre propre Tradition pour voir ce qui s’était passé et en conclure: «Nous avons hérité ces pratiques de l’occupation turque. Les moines, à l’époque, ne pouvaient pas vivre l’authentique vie monastique. L’état actuel du monachisme est une maladie héritée du passé. Nous devons revenir à la Tradition». Mais non, au lieu de se tourner vers notre propre Tradition, ils lorgnèrent vers le monachisme occidental! Ils prirent le modèle occidental pour l’appliquer ici. Leur erreur fut de n’être pas revenus à la Tradition orthodoxe. Voyez, les Turcs respectaient nos sanctuaires, car eux-mêmes avaient souvent vu des miracles s’accomplir par nos saints. Aux monastères, c’est l’aide divine qu’ils demandaient et non pas l’hospitalité.
Le monde reviendra à la tradition
Les hommes apprécieront par ia suite que les chrétiens gardent aujourd’hui l’honneur, la foi, et toute la splendeur de l’Église. Vous verrez, le monde reviendra à la tradition. Un phénomène analogue a eu lieu avec l’iconographie. Il fut un temps où l’on n’appréciait pas l’art byzantin. On arrachait les fresques byzantines des murs pour ôter ensuite le crépis, en appliquer un nouveau et y peindre de nouvelles fresques dans le style de la Renaissance. Après de nombreuses années d’errance, on accorde aujourd’hui une grande valeur à l’art byzantin. Maintes personnes sans piété particulière et même des athées s’empressent de découvrir les vieilles fresques. C’est ainsi que l’on recherchera petit à petit tout ce que l’on a jeté hier au panier, le considérant comme dépassé.
Voyez-vous le renouveau de la musique byzantine? Même de jeunes enfants apprennent la musique byzantine. Jadis, on trouvait difficilement quelqu’un qui la sache. Aujourd’hui, en revanche, certains enfants l’ont si bien appris que les aînés en deviennent complexés! Quelles douces modulations du larynx possède notre musique byzantine! Les morceaux purement byzantins, en particulier, ont des modulations douces et harmonieuses. Les unes sont légères comme le chant du rossignol, les autres ressemblent à des vaguelettes qui se brisent sur le rivage, et elles donnent une certaine majesté à la psalmodie. Toutes rendent et soulignent les pensées divines que véhiculent les hymnes. Mais il est rare d’entendre ces modulations harmonieuses. La plupart des chantres psalmodient d’une façon pauvre et sèche. Ils tronquent les modulations, laissent des trous, des vides. Le pire est qu’ils psalmodient sans accentuer les mots. Je m interroge: les textes de leurs livres ne portent-ils pas d’accent tonique? Sont-ils comme la grammaire actuelle, qui a supprimé les accents et les esprits? Ils psalmodient de façon
bien plate. Tout est au même niveau, comme si un bulldozer était passé par là pour niveler! On les entend répéter Pa4 Ni, Zo, Pa, Ni, Zo, et c’est tout ce qu’ils savent faire! D’autres, au contraire, accentuent les mots sans mettre d’âme à leur chant et, au lieu de psalmodier, ils ne font que crier. D’autres encore accentuent avec force tous les mots et psalmodient toutes les phrases sans faire de différence, martelant les syllabes comme s’ils plantaient des clous avec un marteau! C’est la triste réalité: la plupart des psalmodies sont ou bien dénuées d’accentuation ou bien dures comme des coups de marteau! Elles ne stimulent pas intérieurement, ne transforment pas. Dire que la pure musique byzantine est si harmonieuse! Elle apaise et adoucit l’âme. La vraie psalmodie est le débordement de l’état spirituel intérieur. Elle est une divine allégresse! Le Christ comble le cœur d’allégresse et l’homme prie Dieu d’un cœur exultant d’allégresse. Quand le chantre participe avec tout son être à sa psalmodie, il en est transformé, au bon sens du terme, et tous ceux qui l’écoutent en sont transformés. Il y a quelques années, un chantre éminent vint au Mont Alhos, où il se ridiculisa. Les pères psalmodiaient selon la vraie tradition byzantine, accomplissant les modulations qui ont disparu des partitions actuelles. Ils invitèrent ce chantre à psalmodier avec eux dans le chœur, mais lui ne faisait aucune modulation, car il les ignorait. Les pères athonites*, eux, savaient les exécuter par tradition. Ce chantre et certains autres se posèrent ensuite des questions. Une salutaire inquiétude s’empara d’eux: ils consultèrent alors les manuscrits, s’exercèrent, écoutèrent de vieux chantres qui psalmodiaient selon la tradition, et ils retrouvèrent les modulations héritées des anciens.
Les Turcs également empruntèrent leur musique de Byzance lorsqu’ils vinrent en Asie Mineure. C’est pourquoi les amanedes, les chants populaires turcs parlent, dans une certaine mesure, au coeur, et notre peuple a l’habitude de dire: «Chante en turc, parle en français et écrit en grec!». Je ne veux pas dire que tous les Turcs aient une belle voix, mais, même quand ce n’est pas le cas, ils chantent avec désir et ardeur. Certains Grecs, qui ne savent pas que les amanedes sont des chants byzantins, disent que nous avons emprunté la musique byzantine aux Turcs! Or les Turcs n’avaient ni musique ni rien du tout lorsqu’ils arrivèrent des confins de l’Asie mineure; ce sont eux qui empruntèrent leurs mélodies à la musique byzantine.
– Géronda, comment les catholiques peuvent-ils se plaire à utiliser l’orgue pour les offices?
– Comment? C’est de la musique populaire, disent-ils. Te souviens-tu de ces moniales catholiques en France, qui psalmodièrent à Pâques Le Christ est ressuscité des morts tout en dansant avec une icône? Elles fêtaient Pâques! C’est leur mère supérieure qui tenait l’icône! On voulait du renouveau, et vois où l’on aboutit! J’ai entendu un jour un jeune moine psalmodier une étrange Doxologie. «Que chante-t-il donc?», m’interrogeai-je. «De qui était cette Doxologie?», lui demandai-je ensuite. «De Pierre du Péloponnèse5 , me répondit-il, mais j’y ai apporté des modifications! – Tu y as apporté des modifications! m’exclamai-je. – Quoi, je n’ai pas le droit de faire des modifications à une partition? protesta-t-il. – Compose, si tu veux, ta propre Doxologie, mais ne va pas massacrer celle des autres!». Lui avait pris cette Doxologie, il y avait introduit ses modifications et il aurait osé affirmer ensuite: «C’est une composition athonite!». Il faut faire preuve de vigilance de peur de laisser massacrer les anciennes partitions byzantines par ceux qui veulent soi-disant les corriger.
5. Compositeur de musique byzantine qui vécut au 18eme siècle.
Que celui qui le désire compose quelque chose de personnel et y mette son propre nom. il en a le droit. Mais prendre des anciennes partitions pour y apporter des modifications manifeste un grand manque de piété. C’est comme si une personne ne sachant pas l’iconographie se mettait à restaurer une icône ancienne. Peins ta propre icône si tu le veux, mais ne va pas massacrer celle d’un autre.
Le monde ne peut se maintenir sans la foi
On a voulu supprimer la religion, car on pensait qu’elle était source de problèmes. Or on constate petit à petit aujourd’hui que, sans la foi, l’homme n’a aucun frein et devient comme une bête sauvage. L’être humain ne peut vivre sans idéal. Un journaliste alla poser la question suivante à un ancien dirigeant communiste: «Que doivent faire les hommes politiques actuels pour réussir et que doivent-ils éviter pour ne pas échouer?». Lui répondit: «Nous, nous avons échoué, car nous avons lutté contre l’Église!». Les communistes, eux-mêmes, qui ne croient pas. qui n’ont ni intérêts matériels ni non plus aucune aspiration spirituelle, ont compris qu’ils ne pouvaient pas lutter contre Dieu. Actuellement6 , dans quelques régions de Serbie, on a commencé à construire des églises. Des statistiques ont prouvé que là où il y a des églises, on trouve moins de malades mentaux. moins de crimes, etc. Les dirigeants, bien qu’athées, préfèrent construire des églises plutôt que d’organiser des soins psychiatriques. Même le dictateur roumain Ceausescu, homme sans scrupule qui appelait le christianisme l’opium du peuple, admit que les chrétiens étaient des hommes droits. Car la foi des croyants était un frein dans leur conduite, et ils ne provoquaient pas de désordres. Les incroyants, au contraire, saccageaient tout. Combien de saints la Russie
6. Ces paroles furent prononcées en juin 1985.
a-t-elle donnés! Les hommes s’en prennent au communisme maintenant, et les communistes tentent de justifier leurs crimes en affirmant: «Lénine et Marx étaient d’accord avec le Christ, mais ils n’avaient pas compris son esprit. C’est pourquoi ils ont commis tant de crimes». Car les chrétiens se sont révoltés et ils font entendre cette exigence: «Nous voulons revenir à notre Tradition, à notre religion». Et comme ils ne peuvent pas contenir le peuple, les dirigeants communistes proclament, eux aussi: «Revenons à notre tradition!» – comme si la cause de tous les crimes qu’ils ont commis depuis la révolution russe était qu’ils n’avaient pas bien compris l’enseignement du Christ!
Viendra le temps où non seulement les dirigeants croyants, mais aussi les incroyants comprendront que sans la foi, le monde ne peut se maintenir. Et on imposera en quelque sorte de croire afin de maintenir le monde. Dans quelques années, si tu as manqué de prier un jour, on te mettra en prison… Tu devras rendre des comptes aux dirigeants, avouer si tu as ou non prié … Les choses se mettront ainsi en place.
Nous devons laisser aux générations ultérieures un bon héritage
– Géronda, comment expliquer que dans certaines régions de Grèce les habitants soient tous honnêtes?
– C’est parce que des hommes honnêtes y ont vécu et légué de bonnes coutumes; cette bonne tradition se poursuit. Ce n’est pas la terre du sol qui fait la différence! Lorsqu’un lieu a une tradition, bonne ou mauvaise, cette tradition se transmet. Dans un village d’Épire, aux frontières de 1’Albanie, les habitants avaient l’habitude d’assister aux Vêpres, à la Divine Liturgie lorsqu’elle était célébrée, et même aux Compiles. Que dire, ils vivaient le Paradis dès cette vie et, assurément, ils iront au Paradis dans l’autre Vie! En vivant ainsi, les habitants de ce village n’œuvrèrent pas seulement
pour leur propre compte, mais aussi pour les générations ultérieures, grâce à la bonne coutume qu’ils avaient instaurée. Quand les descendants héritent d’une bonne tradition, cette tradition se poursuit. Au village voisin, en revanche, tous avaient l’habitude de voler. Même leur prêtre, l’unique prêtre que ce village avait donné, volait, lui, les icônes de l’église! Ce n’est pas la terre de ce village qui était mauvaise, mais scs habitants qui avaient une mauvaise habitude. Ils laissèrent ce mauvais exemple se développer, et la mauvaise habitude se poursuivit. Il sera bien difficile et laborieux d’y implanter désormais une bonne tradition. Vois, s’il y a un vaurien dans un village, les autres habitants s’efforcent de démontrer qu’il n’est pas originaire du lieu et, dans ce but, ils iront jusqu’à éplucher tout son arbre généalogique! En présence d’un saint, au contraire, tous s’efforcent de prouver qu’il est leur compatriote! Prenons l’exemple de saint Côme I’Etolien! Alors qu’il était originaire de Grèce du sud, qu’il le veuille ou non. on le classa parmi les saints épirotes, sous prétexte que son père était du village de Grammenochoria en Épire.
J’ai connu un père de famille qui. par nervosité, remuait constamment l’un de ses doigts lorsqu’il parlait. Plus tard, ses enfants firent la même chose: ils remuèrent leur doigt en parlant! Les enfants, en effet, prennent bien souvent toutes les habitudes du père, le copient intégralement. Or l’idéal est de prendre seulement les bonnes habitudes, car sinon, le mal se transmet. Je me souviens d’un jeune homme entré dans un monastère idiorrythmique*, mais qui n’était pas satisfait de la vie monastique qu’il y trouva. Son Géronda le conseillait ainsi: «Prends patience, mon enfant, les choses changeront!». Mais «l’enfant» en question lui répliqua avec justesse: «Géronda, comment les choses pourraient-elles changer? Le disciple du Vieillard N. est exactement comme le Vieillard N., le disciple du Père M. est exactement comme le Père M. Comment les choses pourraient-elles changer?». Lorsqu’une mauvaise habitude existe dans un
monastère ou une communauté et que les disciples n’ont pas d’inquiétude salutaire, mais copient ce qu’ils voient, le mal se transmet. Inversement toutefois, si une inquiétude salutaire anime les novices, un mauvais état spirituel peut se transformer en bon état spirituel. Mais le bien comme le mal peut se transmettre.
Je me suis rendu compte que tout ce qui nous reste actuellement, en fait de tradition patristique ou de règles et usages monastiques, ne sont que des vestiges. Nous devons donc veiller à garder un peu de levain spirituel pour la pâte. Nous avons une responsabilité en tant que chrétiens orthodoxes et n’avons pas le droit de laisser une tradition dégradée à nos descendants.
Il y a quelques années7 , des théologiens et des professeurs d’université se réunirent à Genève pour préparer un synode panorthodoxe. Ils proposèrent de supprimer le Carême de Noël ainsi que celui des Apôtres et de réduire de deux semaines le jeûne du Grand Carême, vu que les fidèles dans leur majorité n’observent plus les jeûnes. Des universitaires grecs participèrent, eux aussi, à ces réunions. Lorsqu’ils vinrent me trouver pour me faire part de ces débats, je fus tellement indigné que je me mis en colère et les apostrophai ainsi: «Ne comprenez-vous pas ce que vous êtes en train de faire? Un malade a le droit de ne pas jeûner, il a une excuse. Pour lui. les règles du jeûne n’existent pas. Mais qu’une personne en bonne santé, qui, par faiblesse, n’a pas observé le jeune dise au moins: «Mon Dieu, pardonne- moi!». Qu’elle s’humilie et avoue: «J’ai péché!». Le Christ n’ordonnera pas qu’on la pende pour avoir transgresse le jeûne! Pour autant, que celui qui est en bonne santé s’efforce d’observer les jeûnes! L’indifférent ne tient pas compte des jeûnes et cela ne le préoccupe pas. Alors tout se met donc en place. Si la majorité de nos contemporains
7. Ces paroles furent prononcées en 1992.
n’observent pas les jeûnes, sans raison valable et si, pour satisfaire cette majorité, nous supprimons les jeûnes, quelles seront les conséquences pour les générations futures? Elles peuvent être plus robustes et se trouver capables d’observer le jeûne de l’Église dans toute sa rigueur! De quel droit allons-nous supprimer tout cela, alors que les choses sont tellement simples?». Les catholiques en sont arrivés à observer une seule heure de jeûne avant la Sainte Communion! Allons-nous, nous aussi, évoluer dans ce sens, bénir nos faiblesses et nos fautes? Nous n’avons pas le droit, par indulgence pour nos faiblesses, de créer un christianisme à notre mesure! Même si peu de personnes sont capables d’observer les jeûnes, nous devons garder l’ordre prescrit par l’Église. Si le malade qui ne peut jeûner se trouve dans un autre environnement que le sien, qu’il mange ce qui lui faut sans se faire remarquer afin de ne pas scandaliser autrui. Qu’il prenne, par exemple, son yoghourt et le mange dans sa chambre. On m’a fait à ce sujet l’objection suivante: «Une telle attitude est de l’hypocrisie! – Pourquoi ne vas-tu pas commettre le péché sur la place publique, lui répliquai-je. afin d’être plus sincère?». Comme le diable sait bien nous présenter les choses! Nous créons notre propre Orthodoxie, interprétons l’Évangile et les Pères à notre mesure. A notre époque où tant de personnes ont reçu une éducation supérieure, l’Orthodoxie devrait briller comme un phare. Que n’a pas fait autrefois un saint Nicodème l’Hagiorite*! Combien d’homélies, combien de livres n’a-t-il pas écrits, tous les synaxaires de l’Église! Il savait toutes les bibliothèques par cœur. N’existait pourtant à l’époque ni ordinateur ni photocopieur!
Chacun d’entre nous doit s’efforcer de devenir un vrai chrétien. Ses sens spirituels s’éveilleront alors. Il souffrira dans une certaine mesure pour l’Orthodoxie, pour sa patrie, et il prendra conscience de sa responsabilité en tant que Grec. S’il apprend quelque chose de grave touchant l’Orthodoxie
ou la patrie, il se sentira concerné, s’inquiétera et priera. Mais s’il faut l’exhorter et lui dire: «Maintenant, tu dois te préoccuper de ceci, puis de cela», il ressemblera à une roue mal équilibrée qu’il faut constamment pousser pour qu’elle puisse avancer. Le but est que l’homme avance de lui-même. Il roulera alors avec harmonie comme une roue bien ronde. Celui qui devient un vrai chrétien se sent mû intérieurement, et Dieu lui révèle davantage de choses que ce qu’il pourrait apprendre dans les livres. Il connaît alors non seulement ce qui est écrit dans les livres, mais encore les pensées des auteurs. Comprenez-vous? Dieu l’éclaire intérieurement et toutes les actions de cet homme sont sous l’emprise de la Grâce divine.
Le Christ nous a laissé un héritage tel que nous n’avons pas le droit de l’anéantir. Dieu nous demandera des comptes. Nous Grecs, une si petite nation, nous avons cru au Messie, et il nous fut donnée la bénédiction d’évangéliser le monde entier. L’Ancien Testament a été traduit en grec cent ans avant la venue du Christ. Que n’ont pas souffert les premiers chrétiens! Leur vie était constamment en danger. Or quelle indifférence existe aujourd’hui! Alors que, sans danger, nous pouvons librement évangéliser les nations, pourquoi sommes-nous devenus indifférents? Si nous vivons actuellement des temps de paix, nous le devons à nos aïeux. Savez-vous ce qu’ont souffert nos ancêtres? Savez-vous combien ils se sont sacrifiés? Si eux n’avaient pas sacrifié leur vie pour la foi et la patrie, nous n’aurions rien aujourd’hui. Et je veux faire une comparaison: alors que leur vie était en danger, ils gardèrent la foi; de nos jours, sans aucune oppression, nous mettons tout au même niveau. Comment expliquer ce phénomène? Ceux qui n’ont jamais perdu leur liberté nationale ne peuvent pas comprendre. Je dis parfois: «Que Dieu nous garde! Que les ennemis incroyants ne viennent pas nous déshonorer!». On me répond. «Et qu’est-ce que nous subirons?». En entendre de telles!
Nos contemporains sont ainsi. Donnez-leur de l’argent, des voitures, et ils ne se soucient ni de la foi, ni de l’honneur, ni de la liberté.
En tant que Grecs, nous devons grandement au Christ, à l’Orthodoxie, aux saints martyrs et aux Pères de l’Église. Notre liberté, nous la devons aux héros de notre patrie, qui versèrent leur sang. Nous devons honorer ce saint héritage, le garder et non pas l’anéantir. C’est un péché qu’une telle nation se perde! Avant qu’une guerre n’éclate, certains sont appelés personnellement à défendre leur patrie; de même nous voyons que Dieu lance aujourd’hui des appels personnels et qu’il rassemble des hommes afin de préserver notre héritage et de sauver Ses créatures. Dieu ne nous abandonnera pas, mais nous aussi, nous devons faire ce qui est possible au plan humain. Et pour ce qui est impossible au plan humain, tournons-nous vers Dieu et prions-Le d’intervenir.