Par cette demande, nous demandons au Seigneur d’étendre la bénédiction de Son amour à l’air, à la terre, à toute la création. Nous demandons que la création entière chemine sur la voie que lui a assignée le Créateur.
Le monde visible a été créé par Dieu comme un Royaume pour l’homme. Celui-ci est « le roi des choses terrestres et le sujet du Roi des Cieux ». La vue même du monde et notre vie en celui-ci donnent à l’homme « une grande réjouissance, et éveillent en son cœur un sentiment de reconnaissance » envers Dieu. L’homme reçoit de Dieu le monde comme une bénédiction et le lui offre en retour avec action de grâces (« Eucharistie »). L’homme est donc le roi et le prêtre du monde de Dieu.
Cette coexistence pacifique de l’homme avec Dieu et le monde fut rompue par la désobéissance des premiers créés. La Terre, qui fut créée comme quelque chose de très bon (Gn 1,31), devint corruptible. L’homme cessa d’être le roi et le prêtre du monde, et devint sujet à la corruption et à la mort. Sa relation avec lui-même, le monde et Dieu, changea. L’homme qui était le maître du monde, devint son esclave : « Il devint inférieur à ces choses dont il avait été créé pour être leur supérieur. » « Lorsqu’Adam sortit du Paradis, toute la création tirée par Dieu du néant, à sa vue, refusait désormais de se soumettre au transgresseur: le soleil ne voulait pas luire, la lune ne supportait pas de paraître, les astres hésitaient à se faire voir de lui, les sources n’allaient plus jaillir, les fleuves refusaient de couler, l’air méditait de se replier sur lui-même et de ne pas donner le souffle au révolté [c’est-à-dire Adam] ; les fauves et tous les animaux de la terre, en le voyant dépouillé de sa gloire antérieure, le prirent en dédain et tournèrent toute leur sauvagerie contre lui; le ciel était déjà comme en mouvement pour s’abattre sur lui avec justice et la terre s’impatientait de le porter sur son dos. » Mais l’amour de Dieu pour l’homme intervient dans cette catastrophe véritablement cosmique : « Il retient tous les êtres par un effet de Sa propre puissance ; avec miséricorde et bonté, Il suspend l’assaut des créatures conjurées. Du même coup II les soumet toutes, comme avant, à l’homme. Il veut que la création, assujettie à l’homme en vue de qui elle a été créée, en devenant corruptible pour [l’homme] corruptible, lorsque celui-ci sera restauré à nouveau et deviendra spirituel, incorruptible et immortel, quelle aussi, alors, soit délivrée de sa servitude… et quelle soit restaurée avec lui, devienne incorruptible et toute spirituelle » (Rm 8, 20-21). Cette intervention de Dieu, pleine d’amour pour l’homme, limita les conséquences de la révolte de l’homme. L’homme et le monde devaient alors attendre la venue bénie du Seigneur.
Tant que la paix de Dieu était absente, le monde avait cessé d’être le « cosmos », c’est-à-dire un ornement de Dieu: « Dès qu’il cesse d’être en paix, il a aussi cessé d’être cosmos. » Cependant, avec la venue du Christ, la paix divine revint sur le monde, qui devint à nouveau ornement de Dieu.
Le monde créé est également invité à la fête de la nouvelle création : « Que la création se réjouisse, que la nature danse… Dansez, montagnes, car le Christ est né! » Dans le Christ Jésus, le monde et l’homme coexistent en paix.
Toutefois, le résultat de l’économie divine dans le Christ n’est pas seulement le retour de l’homme et de la création à leur état antérieur à la chute. C’est aussi la montée jusqu’au lieu où le Christ est assis à la droite de Dieu (Col 3, 1).
La divine liturgie est le Mystère par lequel la paix du Christ s’étend à toute la création. C’est pour cette raison que nous demandons maintenant à Dieu que cesse le désordre catastrophique de la nature, que la terre donne ses fruits à l’homme, et que le monde entier soit en paix conformément au commandement divin : « Les deux qui se meuvent sous Son gouvernement Lui obéissent dans la paix. Le jour et la nuit accomplissent la course qu’il leur a assignée… Le soleil, la lune et le chœur des astres… évoluent à l’intérieur des limites qui leur sont fixées… Les saisons du printemps, de l’été, de l’automne et de l’hiver se succèdent pacifiquement l’une à l’autre. »
C’est cette bénédiction que nous demandons au Seigneur d’élargir: « Accorde-nous un climat tempéré et favorable. Donne à la terre les paisibles ondées nécessaires à sa fertilité. »