Pour que nous soyons délivrés de toute tribulation, colère, péril et nécessité, prions le Seigneur.

Secours-nous, sauve-nous, aie pitié de nous et garde-nous, ô Dieu, par Ta grâce.

Lorsque, pour la première fois, l’homme a goûté au péché et au plaisir qui l’accompagne, il a goûté en même temps à l’amertume de la souffrance et de la douleur : « A cause du plaisir entré dans la nature à l’encontre de la raison, la douleur est entrée ensuite, comme une suite logique… Car la peine naturelle suit inexorablement le plaisir contre nature. »

Dieu a permis que l’homme éprouvât la souffrance afin que fût soignée la plaie résultant du péché : « Aussitôt le péché commis, Dieu a permis la mort et la douleur, ce n’était pas tant pour punir celui qui avait péché que pour procurer un remède à un malade. » Ce qui nous semble être une punition est en réalité un remède divin : « Cela nous semble un châtiment, une vengeance, d’entendre cette parole : Tu mangeras ton pain à la sueur de ton front (Gn 3, 19) ; mais en réalité, c’est un avertissement et une leçon, c’est le remède aux blessures qui nous viennent du péché. »

C’est comme cela que les saints acceptaient les afflictions et les tribulations dans leurs vies: comme un remède divin. Un remède qui soigne la maladie du péché et qui rétablit la santé de l’âme chez l’homme. C’est pourquoi ils appellent les afflictions source de la vertu : « Les commandements de Dieu s’accomplissent dans les afflictions et les restrictions. » Aussi, les saints nous exhortent : « Supporte tes afflictions. Car, au milieu de celles-ci, les vertus croissent et se nourrissent, comme les roses au milieu des épines. » Aux yeux du Seigneur, « les tribulations que l’on supporte pour Lui sont plus précieuses que toutes les prières et tous les sacrifices, et l’odeur de la sueur quelles nous font répandre Lui est plus agréable que tous les parfums ».

Par les afflictions, nous sommes libérés des péchés, et « si nous avons fait quelque chose de bien, nous faisons que ce bien brille d’un éclat encore plus vif ». Avançons de cette manière vers le Royaume de Dieu, dans lequel il nous faut entrer par beaucoup de tribulations (Ac 14, 22). Certes, il est vrai que tout châtiment semble d’abord un sujet de tristesse et non de joie; mais il produit plus tard pour ceux qui ont été ainsi exercés un fruit paisible de justice (He 12, 11). Au début, nous passons par la tristesse de l’affliction, mais si nous acceptons avec patience la peine éphémère, nous recevons par la suite le fruit paisible : la paix du Christ entre dans notre vie.

L’apôtre Pierre pose la question: Quelle gloire y a-t-il à supporter de mauvais traitements pour avoir commis des fautes ? Mais si vous supportez la souffrance lorsque vous faites ce qui est bien, c’est une grâce devant Dieu. Et c’est à cela que vous avez été appelés, parce que le Christ aussi a souffert pour vous, vous laissant un exemple, afin que vous suiviez Ses traces (1 P 2, 20-21). En supportant sans murmurer les tribulations qui se produisent dans notre vie, nous devenons les imitateurs de la Première victime de l’injustice, le Christ.

Les saints ont aimé les afflictions, car ils savaient que s’ils les acceptaient sans murmurer, elles deviendraient la porte du Royaume de Dieu. Ils savaient cependant aussi que, si les afflictions accordent le Royaume à ceux qui sont spirituellement forts, elles peuvent devenir cause de désespoir pour les faibles. Et la demande d’être délivrés des afflictions semble concerner les faibles et non les plus forts.

L’Ancien Païssios disait que « celui qui est spirituellement sain prend plaisir à sa maladie. Celui qui est malade (spirituellement) souffre ». On dit de l’Ancien Philarète, higoumène du monastère athonite de Konstamonitou, que l’un de ses moines le trouva un jour, assis sur son tabouret, attristé. « Que se passe-t-il, Père ? », lui demanda-t-il. Et lui de répondre : « Je n’ai eu aucune épreuve aujourd’hui, mon enfant, Dieu m’a abandonné! »

Saint Jean Chrysostome considère que la seule calamité est le péché. Quant à toutes les autres adversités qui atteignent les hommes, il considère quelles en portent seulement le nom, sans en avoir le contenu: ce sont « des noms vides de sens ». Cependant, le saint, par cette demande, nous exhorte à supplier Dieu de nous délivrer des afflictions. Car il est préférable d’être privés des couronnes que l’on donne aux combattants, plutôt que l’affliction nous conduise au désespoir. Il est préférable que nous reconnaissions notre faiblesse spirituelle et que nous attendions tout de la grande miséricorde du Seigneur.

Une grande foule de toute nation et de toute race prend part à la liturgie céleste décrite par l’évangéliste Jean dans le livre de l’Apocalypse : Ce sont ceux qui viennent de la grande tribulation ; ils ont lavé leurs robes, et ils les ont blanchies dans le sang de l’Agneau. C’est pour cela qu’ils sont devant le trône de Dieu, et le servent jour et nuit… L’Agneau qui est au milieu du trône les paîtra et les conduira aux sources des eaux de la vie, et Dieu essuiera toute larme de leurs yeux (Ap 7, 14-17).

La grande tribulation est cette vie. Alors qu’ils traversent la vallée des afflictions, les fidèles participent à la divine liturgie. Par la grâce du très saint Sang du Christ, ils blanchissent la robe de leur âme et ils arrivent vêtus de blanc à l’Autel céleste. Là, au milieu d’eux, est l’Agneau, le Christ. Son amour les paît et transforme les larmes de la grande tribulation en un torrent d’eau vivifiante.