”Originaire d’une famille sénatoriale de Carthage (468), Claude Gordien Fulgence devint procureur général des impôts de la province de Byzacène. Une brillante carrière s’ouvrait devant lui, honneurs et richesses lui étaient promis, mais, suite à la lecture des œuvres de saint Augustin, il décida d’abandonner tout ce qui le retenait au monde et demanda à être reçu comme moine dans la communauté dirigée, non loin de là, par l’évêque Fauste. Les hésitations de Fauste pour accepter ce délicat aristocrate furent bien vite dissipées quand il constata sa fougue pour les combats ascétiques. Les moines ayant été dispersés par la persécution arienne, il rejoignit un monastère voisin, où il fut bientôt chargé de la direction spirituelle des frères. Chassé de nouveau par l’incursion des Numides, il erra de lieu en lieu, fut arrêté et cruellement torturé par les ariens, jaloux de ses éloquentes prédications. Il trouva finalement un peu de paix à Mididi, aux confins de la Mauritanie.

Le saint rêvait d’imiter les vertus des solitaires d’Égypte et entreprit d’aller les visiter; mais, parvenu à Syracuse, on l’en dissuada, sous prétexte que ses régions étaient désormais infestées par les hérétiques, aussi continua-t-il jusqu’à Rome. De retour en Afrique, un noble chrétien, admirateur fervent de ses vertus, le chargea de fonder un monastère. L’œuvre achevée, Fulgence s’enfuit pour trouver la solitude, afin de se consacrer totalement à la prière, à l’étude et à un modeste travail manuel. Son évêque Fauste l’obligea pourtant à reprendre ses fonctions de supérieur, l’ordonna prêtre et, malgré ses résistances, il dut accepter de devenir évêque de l’Église de Ruspe (près de Tunis), en 508. Il ne changea toutefois rien à la manière qu’il avait de vivre dans le désert: jeûnant à l’extrême et passant toutes ses nuits en prière. Le roi des Vandales Thrasimond, farouche partisan de l’arianisme, irrité par la ténacité des évêques orthodoxes, les exila en Sardaigne, où Fulgence, le plus jeune d’entre-eux, ne cessa de les réconforter, et s’illustra par une activité théologique et oratoire admirable.

Thrasimond, informé de ses talents, le convoqua pour s’entretenir avec lui et fut si impressionné par les arguments du saint évêque qu’il le chargea de composer un vaste traité exposant la doctrine orthodoxe contre les ariens. Les hérétiques parvinrent cependant à faire renvoyer en Sardaigne ce dangereux adversaire; mais pour peu de temps, car, le roi Thrasimond étant mort en 523, Hildéric son successeur rendit la liberté aux Églises si longtemps persécutées. Les évêques rentrèrent bientôt, accueillis par les ovations des fidèles, et saint Fulgence acquit dès lors une autorité particulière dans l’Afrique chrétienne: on accourait de toutes parts pour entendre ses sermons qui faisaient verser des larmes aux plus endurcis. Il contribua aussi grandement au développement du monachisme et à la prospérité de l’Église de Ruspe. Parvenu à un âge avancé, il se retira seul dans la petite île de Kerkenna (Chilmi), où il put se préparer à son départ vers Dieu dans le silence, la prière et les larmes. Rentré à Ruspe sous la pression de ses fidèles, il remit son âme au Seigneur, le ler janvier 532, après avoir humblement demandé pardon à ses clercs et à ses moines des torts qu’il avait pu leur faire et en exhortant tous les fidèles à persévérer dans la foi et l’amour des saintes vertus. On a pu dire de lui qu’il fut le plus docte et le plus saint des évêques de son temps.