”Fille d’un puissant magistrat de Rome, Anthime, à l’époque de Léon 1er (vers 470) [D’après S. Nicodème, dans le texte ancien de la vie, Apollinaire est fille de l’empereur lui-même: Anthime(?)], Apollinaire dépassait la plupart des jeunes filles de ce temps en beauté et en sagesse. Éprise depuis son jeune âge d’un amour ardent pour Notre Seigneur Jésus-Christ, elle obtint de ses parents, au terme de ses supplications insistantes, de Lui consacrer sa virginité et de partir en pèlerinage vers les lieux qu’Il a sanctifiés par son séjour sur la terre. Une fois à Jérusalem, elle donna congé aux nombreux esclaves et serviteurs de sa suite, distribua aux pauvres ses vêtements, ses parures et son argent, et se dirigea vers l’Égypte, le Paradis des ascètes, accompagnée seulement d’un eunuque et d’un vieux serviteur. Parvenus près d’Alexandrie, elle leur faussa compagnie et s’établit dans une forêt voisine, où elle resta pendant de longues années, soumettant sa chair à l’esprit par toutes sortes de mortifications et endurant avec patience les assauts incessants des moustiques, dont les piqûres rendirent sa peau délicate aussi dure que la carapace d’une tortue. De là elle se rendit au prestigieux centre monastique de Scété, en se faisant passer pour un eunuque du nom de Dorothée. L’ancien qui détenait l’autorité sur les ermites, à la suite de saint Macaire [Le texte ancien met en scène saint Macaire le Grand lui-même, mais à cette époque le fondateur de Scété était mort depuis longtemps († 390)], lui attribua une cellule, où la bienheureuse put persévérer dans la prière, jour et nuit, sans être troublée par rien de ce monde.

Son père, Anthime, déjà profondément affligé par la disparition d’Apollinaire, avait une seconde fille possédée d’un cruel démon. Désespérant de tout secours humain, il l’envoya auprès des pères de Scété, en la recommandant à leurs prières, et ceux-ci la confièrent à l’eunuque Dorothée qui, après quelques jours d’instantes supplications, leur renvoya sa sœur complètement guérie. Peu après le retour de la jeune fille dans la maison paternelle, on s’aperçut qu’elle était enceinte. Anthime, soupçonnant le moine Dorothée, le convoqua sans retard, mais quelle ne fut pas sa surprise en découvrant que celui qui avait délivré sa fille cadette du démon était en fait sa chère Apollinaire, dont il avait depuis longtemps désespéré de retrouver la trace. Au bout de quelques jours la sainte regagna sa cellule, en faisant promettre à sa famille de garder son secret, qui ne fut découvert avec admiration par les pères de Scété qu’au moment de sa mort.