”Saint Jacques était fils du premier mariage de Joseph le divin fiancé. Cet homme fut béni par Dieu dès le sein de sa mère et à cause de son éminente justice, tous ceux de sa race l’appelaient «le Juste» et «Oblias», ce qui signifie en hébreux «rempart du peuple» et «justice». Dès son enfance, il vécut dans l’ascèse la plus stricte. Il ne buvait ni vin, ni boisson fermentée. Comme saint Jean le Précurseur, il ne mangea jamais rien qui eût vécu. Le rasoir ne passa jamais sur sa tête, comme le recommande la Loi à ceux qui se consacrent à Dieu. Il ne prenait jamais de bain et ne s’oignait pas d’huile, préférant le soin de l’âme à celui du corps.
Après l’Ascension aux Cieux du Seigneur, les Apôtres unanimes choisirent Jacques le Juste comme premier évêque de Jérusalem. Accompli dans toutes les vertus de la vie active et de la contemplation, Jacques pénétrait seul dans le sanctuaire de la Nouvelle Alliance — non pas une fois par an, comme le grand-prêtre des Juifs, mais chaque jour — afin d’y célébrer les saints Mystères. Vêtu de lin, il pénétrait seul dans le temple, et se tenait de longues heures à genoux, intercédant pour le peuple et le salut du monde, de telle sorte que ses genoux s’étaient durcis comme la pierre. C’est lui qui présidait au conseil des Anciens et qui, lors des discussions intervenues à Antioche sur la nécessité de circoncire les païens qui embrassaient la foi, demanda qu’on ne les tourmente pas avec les préceptes de l’ancienne Loi, mais qu’on leur demande seulement de s’abstenir des viandes immolées aux idoles et de la fornication (cf. Actes 15, 20). C’est lui qui écrivit également la Lettre qui porte son nom dans le canon des Écritures. Dans celle-ci, il corrige ceux qui considéraient Dieu comme la cause des maux. «Dieu, en effet ne tente personne, dit-il, mais chacun est tenté par sa propre convoitise qui le pousse et le séduit» (Jc 1, 14). Il exhorte aussi à ne pas se contenter de confesser sa foi dans le Christ, mais à la faire resplendir dans les œuvres de la vertu.
Car «de même que sans le souffle de vie le corps est mort, ainsi la foi sans les œuvres est morte» (Jc 2, 26). Il ajoute de nombreuses autres recommandations pour mener une vie agréable à Dieu et obtenir la sagesse d’En-Haut, nous apprenant à reconnaître en tout le don de Dieu: «Tout don excellent et tout cadeau parfait viennent d’En-Haut et descendent du Père des lumières, qui ne connaît ni variations, ni obscurcissement passager» (Jc 1, 16). C’est lui aussi qui a rédigé la divine Liturgie conservée sous son nom, source de toutes les Liturgies de l’Église Orthodoxe. [Dans certaines églises et monastères, on célèbre aujourd’hui l’antique Liturgie de Saint-Jacques.] Vers l’an 62, alors que la Judée était dans le désordre et l’anarchie après la mort du gouverneur Festus, les Juifs, qui avaient échoué dans leur tentative de mettre Paul à mort (Actes 25-26), s’en prirent à Jacques, dont la réputation de juste parmi le peuple donnait forte créance à sa prédication. Beaucoup, et même des chefs du peuple, avaient déjà embrassé la foi, et les scribes et les pharisiens s’émouvaient et craignaient que tous reconnaissent bientôt en Jésus le Christ Sauveur. Ils allèrent donc perfidement vers Jacques, louèrent sa vertu et sa justice, et lui dirent: «Nous t’en prions, toi qui es juste et ne fais pas acception des personnes, persuade le peuple, qui va bientôt se réunir pour la Pâque, de ne pas s’égarer sur la personne de Jésus.
Tiens-toi donc sur le pinacle du temple, afin que de là-haut tu sois en vue et que tes paroles soient entendues de tout le peuple et des païens qui sont accourus en foule pour la fête». Lorsqu’il fut monté au sommet du temple, les scribes et les pharisiens lui crièrent d’en-bas: «Juste en qui nous devons avoir confiance, puisque le peuple se trompe en suivant Jésus le Crucifié, annonce nous qui est ce Jésus». Jacques répondit alors à haute voix: «Pourquoi m’interrogez-vous sur le Fils de l’homme? Il est assis maintenant au ciel à la droite de la Grande Puissance et il reviendra sur les nuées du ciel pour juger l’univers avec justice.» Beaucoup furent alors convaincus par le témoignage de Jacques et criaient: «Hosanna au Fils de David!» Mais les scribes et les pharisiens grinçaient les dents de rage et s’écriaient: «ô, même le Juste a été égaré». Et ils accomplirent la prophétie écrite par Isaïe: «Enlevons le Juste, parce qu’il nous est insupportable» (Is. 3, 10).
Ils se ruèrent donc vers le pinacle du temple et jetèrent en bas le Juste. Jacques ne mourut pas en tombant, malgré la hauteur; mais s’étant retourné et mis à genoux, il cria vers Dieu: «Je t’en prie, Seigneur Dieu Père, pardonne-leur car ils ne savent pas ce qu’il font». Tandis qu’il priait ainsi pour ses bourreaux, à l’exemple du Christ et de saint Étienne (cf. Luc 23, 34; Act. 7, 59-60), les juifs le lapidaient. L’un d’entre eux, devenu furieux en voyant la charité inébranlable du Juste, prit le bâton avec lequel il foulait les étoffes et lui en frappa la tête. C’est ainsi que Jacques le Juste rendit témoignage. On l’enterra sur les lieux mêmes, près du temple. Jacques était si admirable et si renommé pour sa vertu que les juifs les plus raisonnables virent dans son martyre la cause immédiate du siège et de la ruine de Jérusalem en l’an 70. [Il faut distinguer saint Jacques, fils d’Alphée (9 oct.) apôtre et frère de l’Évangéliste saint Matthieu; saint Jacques le frère du Seigneur, commémoré aujourd’hui et le dimanche qui suit la Nativité; et Jacques, fils de Zébédée et frère de saint Jean le Théologien (30 avril).]