”D’origine païenne, le saint apôtre Tite fut converti par saint Paul, qui le nomme : « mon enfant véritable en notre foi commune » (Tite 1, 4). Plusieurs années après (vers 49), ils se retrouvèrent à Antioche et Paul l’emmena avec Barnabé à Jérusalem, pour rendre compte aux Apôtres de sa mission auprès des païens. Convaincus par les arguments de Paul sur l’affranchissement des préceptes de la Loi, les membres de ce premier concile n’exigèrent pas que Tite fût circoncis. Dès lors il suivit l’Apôtre dans ses missions et devint l’un de ses plus proches collaborateurs. C’est lui qui fut envoyé à Corinthe pour y porter la première lettre de l’Apôtre et expliquer comment devait se faire la, collecte au profit des fidèles de Jérusalem (cf. II Cor. 8, 6). Mais après que Tite eut quitté la ville pour aller rapporter à Paul les résultats de sa mission, des troubles sérieux divisèrent les chrétiens de Corinthe. Paul, qui se trouvait à Éphèse (vers 55), remit alors à Tite une lettre « écrite avec beaucoup de larmes et angoisse du cœur » (II Cor. 2, 4), afin de corriger ces dérèglements. Il fut accueilli avec crainte et tremblement, comme porteur de l’autorité apostolique, et après avoir restauré le bon ordre et la charité, il alla retrouver son maître en Macédoine, pour lui rapporter avec joie l’obéissance montrée par les Corinthiens (II Cor. 7, 15). Par la suite, Paul l’envoya de nouveau dans cette ville, avec deux autres compagnons, avec pour mission de remettre aux Corinthiens sa
seconde Lettre et de recueillir les fruits de leur collecte.

S’étant trouvé de nouveau avec saint Paul à Rome, lors de sa première captivité, Tite l’accompagna dans son voyage de retour vers l’Orient. Abordant dans l’île de Crète, ils évangélisèrent ensemble plusieurs villes, et Paul, qui devait continuer ses périples, y laissa Tite afin d’y compléter l’organisation de la nouvelle Église en établissant dans chaque ville des évêques (vers 63 ; cf. Tite 1, 5). Comme il rencontrait de fortes oppositions, surtout de la part des Juifs, Tite écrivit à Paul, qui lui répondit en l’encourageant à enseigner tout ce qui est conforme à la saine doctrine et à offrir en sa personne un exemple de bonne conduite : « pureté de doctrine, dignité et enseignement irréprochable, afin que ses adversaires, les colporteurs de fables juives et ceux qui tournent le dos à la vérité, ne pouvant dire aucun mal des fidèles, soient remplis de confusion » (cf. Tite 1-2).

Averti par cette missive de se tenir prêt à rejoindre Paul à Nicopolis (Tite 3, 12), c’est de là que Tite fut envoyé pour une nouvelle mission en Dalmatie (vers 65 ; cf. II Tim. 4, 10). Après le martyre de saint Paul, il regagna la Crète, qu’il gouverna avec sagesse et zèle pastoral, jusqu’à un âge avancé. Il s’endormit en paix et son corps fut déposé dans la cathédrale de Gortyne, son siège épiscopal, où on le vénéra pendant de nombreux siècles comme le protecteur de l’Église de Crète. Lorsque l’île fut libérée de ses occupants arabes, on transféra la capitale à Candaque et une nouvelle cathédrale fut édifiée là en l’honneur du saint apôtre Tite. Cette église resta le principal centre de pèlerinage de Crète pendant toute la période de l’occupation vénitienne (1210-1669). Chassés de l’île par les Turcs (1669), les Vénitiens emportèrent avec eux le crâne de saint Tite, qui fut déposé dans l’église Saint- Marc. Cette précieuse relique a été restituée à l’Église de Crète le 12 mai 1966.

D’après une autre tradition ecclésiastique, saint Tite aurait été un lointain descendant du roi de Crète Minos et montra dès sa jeunesse un vif attrait pour les sciences païennes. Lorsqu’il eut vingt ans, il entendit une voix céleste lui dire : « Tite, il te faut quitter ce lieu pour te rendre à Jérusalem et trouver le salut de ton âme, car la sagesse profane ne peut rien lui apporter d’utile. » Craignant cependant que cette voix ne vienne des démons pour le jeter dans l’illusion, il continua d’étudier les lettres païennes. Au bout de neuf ans, il eut une nouvelle vision au cours de laquelle il reçut l’ordre de lire les livres juifs. Il ouvrit donc le livre d’Isaïe et tomba sur ces paroles : « Îles nombreuses, inaugurez pour moi une fête. Israël recevra du Seigneur un salut éternel. » (Is. 45, 16). Le proconsul et gouverneur de Crète, qui était aussi l’oncle de Tite, ayant entendu vanter les miracles accomplis par Jésus à Jérusalem et dans toute la Palestine, décida alors, en accord avec les notables de l’île, d’envoyer son neveu sur place pour plus ample information. Parvenu à Jérusalem, Tite vit le Seigneur et les miracles qu’il accomplissait, et fut témoin de sa Passion vivifiante, de sa Résurrection et de son Ascension. Il était même, dit-on, au nombre des disciples qui reçurent le Saint-Esprit le jour de la Pentecôte. Ordonné prêtre par les Apôtres, il fut ensuite envoyé en mission avec saint Paul. Ils se rendirent ensemble à Antioche, puis dans la région de Séleucie et de là en Chypre. De Salamine, ils gagnèrent ensuite Pergé de Pamphylie, Antioche de Pisidie et Iconium (cf. Actes 13, 4-6; 13-14, 52), puis ils prêchèrent à Lystres et Derbée, endurant dans toutes ces missions persécutions et mauvais traitements. Quand ils arrivèrent en Crète, ils furent reçus par le gouverneur Rustillus, qui était beau-frère de Tite. Celui-ci essaya de les persuader de ne point prêcher contre les dieux païens, mais sans succès. Peu après, saint Paul ressuscita par sa prière le fil du magistrat, qui venait de mourir. Dès lors Rustillus manifesta honneur et respect envers les missionnaires, leur laissant toute licence de répandre la Bonne Nouvelle dans l’île. Mais au bout de trois mois, il fut appelé à Rome pour y être nommé consul. Les Juifs commencèrent alors à troubler la communauté chrétienne naissante par leurs discours vains et mensongers, sans oser toutefois s’en prendre aux apôtres qui étaient protégés par un personnage si haut placé.

Quittant l’île de Crète pour gagner Éphèse, où de nombreux païens se convertirent, Paul aurait envoyé Tite, Timothée et Éraste à Corinthe. Et après avoir assisté le grand Apôtre jusqu’à sa mort, Tite aurait collaboré à la confirmation de la mission en Grèce et à Colosses, avant de regagner sa patrie pour y poursuivre l’évangélisation. Il y fut reçu avec allégresse par les habitants, mais il s’aperçut bien vite que ceux-ci avaient gardé leurs usages païens. L’apôtre approcha alors de la statue d’Artémis et il la renversa à terre au Nom du Christ. Plus de cinq cents païens se convertirent devant ce miracle et s’écrièrent: « Grand est le Dieu prêché par Tite! » Installant son siège épiscopal à Gortyne, saint Tite établit neuf évêques pour les principales villes de Crète, et il confirma la vraie foi, tant par sa parole que par ses miracles. Lorsqu’âgé de 94 ans, le saint apôtre approcha de la mort, sa demeure fut soudain remplie d’une nuée parfumée, une foule d’anges apparut pour l’assister et, le visage aussi radieux que le soleil, il remit son âme à Dieu en prononçant ces paroles: « Seigneur, j’ai gardé la foi et j’ai confirmé ton peuple dans ta crainte. Reçois maintenant mon esprit. » Lorsqu’on emmena son corps, revêtu de blanc, pour être enseveli, les temples païens s’écroulèrent, et par la suite de nombreux possédés furent délivrés auprès de son tombeau.