”Saint Euphrosynos était d’origine paysanne et simple d’esprit. Il se retira dans un monastère, où il devint serviteur et aide à la cuisine dans les tâches les plus ingrates. Il était la risée de tous, mais supportait les moqueries avec une constance et une douceur inébranlables. Il y avait dans ce monastère un prêtre, ami de Dieu, qui désirait ardemment que le Seigneur lui révélât quels biens Il réserve à ceux qui l’aiment. Un nuit, alors qu’il dormait, il lui sembla qu’il était transporté en songe au Paradis, dans un jardin plein d’ineffables délices. Au centre de ce jardin, se trouvait Euphrosynos, qui goûtait à ces biens et se réjouissait avec les Anges. Le prêtre s’approcha de lui, et lui demanda où ils se trouvaient. Euphrosynos répondit : « C’est ici la demeure des élus de Dieu que tu désires voir depuis tant d’années. Moi je suis ici par la bonté de Dieu, qui a bien voulu me pardonner mes péchés ». Voyant que ces biens ineffables que « l’œil n’a point vu, que l’oreille n’a point entendu et qui ne sont pas montés au cœur de l’homme » (I Cor. 2, 9) pouvaient aussi être, dans une certaine mesure, accessibles aux sens des habitants de cette demeure, le prêtre demanda à Euphrosynos s’il pouvait prendre avec lui quelques uns des fruits de ce jardin. Euphrosynos prit alors trois pommes, et les plaça dans le manteau du prêtre. À ce moment, celui-ci fut réveillé par la sonnerie qui appelait à l’office du matin. Comme il se secouait, pensant sortir d’un rêve, il fut stupéfait de découvrir dans son manteau les trois pommes qui dégageaient une suave odeur, inconnue ici-bas. À l’église, il vit Euphrosynos à sa place habituelle et se dirigea vers lui, le suppliant de lui dire où il était la nuit précédente. Celui-ci répondit: « Pardonne-moi, Père, mais j’étais là où tu me trouves maintenant ». Mais sur les instances du pieux prêtre, qui le pressait de ne pas laisser cacher les bienfaits de Dieu, l’humble Euphrosynos finit par dire: « Qui, Père, j’étais dans ce jardin, où tu as vu les biens que Dieu réserve à ses élus. C’est ainsi que le Seigneur a voulu te révéler ce mystère par l’entremise de moi, l’indigne ». Le prêtre s’empressa de révéler à tous ce dont il avait été témoin et de leur montrer les pommes en guise de preuve. Grâce à ce signe, les moines furent encouragés à courir avec plus de zèle sur la voie de la vertu, et ceux qui goûtèrent aux pommes furent guéris de toutes sortes de maladies. Quant au bienheureux Euphrosynos, craignant plus que tout la louange des hommes, il s’enfuit secrètement du monastère.